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Technophobie/-- « Poètes, votre ADN »

Le 17 juin 1998, la loi relative à la répression des infractions sexuelles et à la prévention des mineurs donne naissance au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Il a alors pour objectif de ficher l'ADN des personnes coupables de crimes ou délits sexuels. Après le 11 septembre 2001, l'arsenal législatif sécuritaire s'accélère et, l'occasion faisant le larron, des lois sont votées permettant une très large extension du champ de compétence du FNAEG (LSQ le 15 novembre 2001, LSI le 19 mars 2003, loi Perben 2 le 9 mars 2004).
Désormais, le fichier concerne la quasi-totalité des crimes et délits d'atteinte aux biens et aux personnes, à l'exception notable des crimes en col blanc ( délinquance politique et financière ). Il ne s'applique non plus seulement aux condamnéEs, mais aussi aux suspectEs.
Refuser le prélèvement des empreintes génétiques constitue un délit puni de un an de prison et de 15 000 euros d'amende, que l'on soit coupable ou suspect (un condamné pour crime est puni de 2 ans et de 30 000 euros). Cependant, il est possible pour la flicaille d'identifier l'empreinte génétique d'unE refuznik à partir « de matériel biologique qui se serait naturellement (sic) détaché du corps de l'intéresséE ». Dans le texte, ils admettent le principe de l'inviolabilité du corps humain, qui leur interdit de prélever de force, une précision qui les protège d'éventuels dérapages. La loi émet une exception à ce principe en légitimant l'usage de la contrainte, pour les condamnéEs à une peine de dix ans de taule. Un aveu implicite de l'usage des coups en prison. En outre, une personne condamnée, et encore en zonz, qui refuse le prélèvement, se voit retirer les réductions de peine dont elle a pu bénéficier auparavant (!!!) et interdire l'octroi de nouvelles réductions de peine.

Le FNAEG est placé sous le contrôle d'un magistrat. La décision de ficher une personne est prise par un officier de police judiciaire, agissant soit d'office, soit à la demande du procureur de la république ou du juge d'instruction.
Une fois le FNAEG alimenté, la procédure pour retirer ses empreintes du fichier est assez compliquée et dépend en grande partie du procureur de la république. Fin 2004, le FNAEG comprenait 40 000 empreintes ADN et l'objectif affiché par Sarkozy est l'inscription de 400 000 nouveaux profils ADN chaque année. La période des prélèvements massifs et spectaculaires peut commencer. Ce sont les personnes qui sont déjà sous contrôle effectif de l'Etat qui servent de population test : entre le 20 octobre 2003 et 26 février 2004, plus de 2000 détenus ont été fichés ; en avril 2004, c'est au tour des jeunes des centres éducatifs fermés. Il s'agit de travailler sur des populations cobayes, avec la volonté affichée d'étendre le champ d'application à toute la population.
En juin 2005, le procureur de la république de Créteil a demandé aux services de police du Val-de-Marne de convoquer tous les enfants âgés de plus de 13 ans, condamnés depuis le 1er octobre 2004, afin de recueillir leur ADN.
Au Royaume-Uni, le fichier génétique a été mis en place en 1994 : il est passé de 40 000 empreintes en 1995, à plus de 3 millions aujourd'hui. La procédure d'identification des empreintes génétiques est devenue banale, et toute incivilité, comme cracher dans un bus ou pisser contre un mur, est suffisante pour y passer*.
L'époque des seuls gants est révolue, soyons vigilants et sortons couverts. Il est désormais vivement déconseillé de cracher à la gueule d'un flic...si vous n'avez pas prévu de le passer à l'acide juste après !

* A titre d'anecdote, une amie racontait qu'à Londres, un de ses amis avait été ramassé par les flics 5 fois en quelques semaines – pour une broutille –, et ramené chaque fois dans le même comico, où on lui avait pris 5 fois son ADN. A 5 reprises il a donné un nom différent, puis est ressorti tranquillement, sans qu'aucun fichier, et pire, sans qu'aucun des flics ne le reconnaisse et ne le confonde. Les ministères de la Peur comptent beaucoup sur la peur insufflée pour se protéger des failles inévitables du système...
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